jeudi 24 juillet 2008

D'un ogre à l'autre.

Allez ! On commence la suite de "l'ogre de l'autoroute" ?
Mais d'abord il faut que je vous raconte un peu, parce que l'échantillon s'arrêtait au milieu de l'histoire.
A l'instant où Kévin a dit oui, Morgane et lui se sont trouvés transportés devant le vrai château à l'époque de la Révolution. C'est à cette époque qu'avait été perdu un parchemin où était expliqué comment libérer la famille de Morgane d'une vieille malédiction. Ils ont retrouvé le parchemin et fait comme il y était dit. Et quand Morgane a passé une bague au doigt de Kévin en lui faisant un bisou sur les lèvres, ils se sont retrouvés sur la plage, à l'instant même où Kévin avait dit oui.
Evidemment les parents de Morgane ont eu un peu de mal à les croire, mais il y avait la bague qui prouvait leur
aventure ... Il ne restait plus qu'à faire le même récit à ceux de Kévin.

- Attendez ! a dit le Comte. Déjà nous qui connaissons une partie de l'histoire, nous avons eu du mal. Alors les parents de Kévin, ils ne vont rien comprendre ! Essayez de résumer en mettant tout bien dans l'ordre et …pour la malédiction, pas la peine de parler d'ogres, dites seulement que dans notre famille tous les papas meurent quand leur fils aîné a sept ans depuis que notre ancêtre a fait brûler une sorcière avec son fils de cet âge. Ce sera plus simple.


Ils n'avaient qu'une quinzaine de mètres à faire, et Kévin a dit à ses parents :


- Voilà Morgane. C'est elle qu'on avait croisée sur le parking avec ses parents hier, et elle s'appelle vraiment Morgane et elle est vraiment ici, comme dans mon rêve et elle m'a proposé de visiter son château et alors on s'est retrouvés devant et c'était pendant la Révolution et …


- Qu'est-ce que tu racontes? a coupé Papa. Bonjour Morgane. Dis donc, je ne sais pas si c'est parce que tu lui as fait la bise, mais tu sais, d'habitude il délire pas comme ça !


- Non mais il a raison, Monsieur ! D'ailleurs la bise, c'était après, quand je lui ai mis la bague, dans la chapelle !


- Attends, a dit Maman. Je ne vous ai pas quittés des yeux quand il t'a rejointe tout à l'heure. Bonjour Morgane. Vous avez bavardé pendant peut-être trente secondes, puis tu l'as pris par la main, vous avez fait quelques pas vers le château de sable et tout d'un coup tu lui as fait un bisou et vous êtes revenus vers tes parents. C'est tout. Alors de quoi parlez-vous ?


- Papa nous avait prévenus, a dit Morgane en se retournant vers Kévin. Ils vont avoir du mal.


- On sait que c'est pas croyable, a repris Kévin, mais son père a quand même dit qu'il y a deux preuves. La bague qui vient de son ancêtre : il l'avait jamais vue, Morgane non plus et pourtant elle me l'a bien passée au doigt. Et puis tu l'as dit, Maman, si on s'est parlé que trente seconde, on peut pas avoir inventé tout ça ensemble en trente secondes. Alors il faut nous écouter sans nous interrompre. D'abord dans mon rêve de cette nuit elle m'avait dit qu'elle venait en vacances ici. Alors quand j'ai vu qu'elle y était pour de bon, et qu'elle s'appelait vraiment Morgane et que son père avait fait un château de sable qui ressemblait à celui de mon rêve, forcément il fallait qu'on s'explique !


- Et quand il m'a dit ça et qu'on s'est aperçu qu'on était nés le même jour, je sais pas pourquoi, ça m'est venu tout seul, je lui ai demandé s'il voulait visiter mon château, a continué Morgane.


- Et quand je lui ai dit oui on s'est retrouvés devant le vrai mais pas maintenant. Alors comme on était tout nus, on a voulu faire comme le marquis de Carabas pour avoir des habits, mais en fait on était invisibles et alors …


- Il faut parler de la malédiction Kévin, sinon ils vont rien comprendre, est intervenue Morgane.


Et tant bien que mal ils ont expliqué la malédiction, en simplifiant comme le père de Morgane le leur avait conseillé, et comment ils avaient trouvé le secret, et comment Kévin avait pris la bague au doigt du Comte mort, et comment dans la chapelle, pour que ses parents puissent lui faire un petit frère, Morgane la lui avait passée au sien en lui faisant un bisou sur les lèvres.


- Et c'est à ce moment-là qu'on s'est retrouvés sur la plage, a conclu Kévin. Et vous nous dites qu'on a toujours été là et qu'il ne s'était pas passé de temps, mais nous, là-bas, ça a bien duré au moins deux heures, rien que dans la rivière, on avait joué longtemps, alors maintenant on se connaît bien et on a envie de jouer ensemble tout le temps. Tu viens Morgane ?


Et laissant ses parents médusés, il l'a entraînée vers la mer.



Mais une heure après, Maman l'a appelé. Surmontant leur timidité, elle et Papa s'étaient rapprochés du Comte et de la Comtesse qui, ajoutant quelques explications, leur avaient confirmé qu'il leur fallait bien croire à l'incroyable récit des enfants. Ils avaient deux choses en commun : être nus sur la plage de Marseillan et avoir des enfants qui avaient vécu ensemble cette aventure extraordinaire. Cela avait effacé leurs différences sociales, ils avaient sympathisé et convenu qu'il fallait permettre à Morgane et Kévin d'être ensemble autant qu'ils le voudraient pendant ces vacances. Mais c'en était le premier jour et Maman tenait à ce qu'on ne reste pas trop longtemps au soleil.


- Il faut qu'on aille se mettre à l'ombre, a-t-elle expliqué. Sinon, crème ou pas crème, demain on va être tout rouges. Alors on va préparer le déjeuner, il est déjà midi et si on n'est pas trop roses on reviendra peut-être un peu en fin d'après-midi.


- Nous avons déjà pris un peu de soleil chez nous a précisé la Comtesse. Cela nous permet de rester un peu plus longtemps, d'ailleurs, midi à l'heure d'été, ça ne fait que dix heures, le soleil n'est pas encore au zénith. Mais nous n'allons tout de même pas tarder. Nous aussi nous faisons la sieste aux heures chaudes et nous revenons nous baigner plus tard.


- Tu veux pas visiter notre camping ? a proposé Kévin à Morgane. Moi j'ai bien visité ton château !


- Je peux ? a demandé Morgane.


- D'accord. Nous te prendrons en passant dans une demi-heure, a dit le Comte. Tu n'auras qu'à nous attendre sur la plage devant le camping. Tiens, mets ton maillot.


- Je préfère le paréo, a protesté Morgane, tandis que Kévin se rhabillait. On va marcher au soleil et avec le maillot ça fait des marques, j'aime pas !


- Mets-le quand même dessous, a dit sa mère. Au camping, si le paréo s'ouvre ça pourrait choquer des gens.



Tout en marchant au bord de l'eau, Morgane a expliqué qu'elle et ses parents logeaient comme tous les ans chez sa grand-mère, qui avait une villa un peu plus loin, et que ce serait bien si Kévin pouvait l'y accompagner tout à l'heure : c'était très facile, depuis le camping il n'y avait qu'à suivre la plage dix minutes, la villa était presque les pieds dans l'eau.


- Et vous ne vous baignez pas en face ? s'est étonné Kévin.


- Ben non ! Là-bas c'est textile. Chez Mamie on fait ce qu'on veut, il y a des haies autour du jardin, mais sur la plage il faut mettre un maillot pour se baigner, alors comme on n'aime pas on marche un peu pour aller là où on n'en met pas.


- Et chez ta Mamie vous en mettez pas ?


- Ça dépend. Je t'ai dit : on fait ce qu'on veut. Moi en général je mets juste un paréo quand on sonne à la grille, sinon je préfère sans rien, sauf quand il fait mauvais. Mais ici en juillet, c'est pas souvent !


Kévin a un peu de mal à imaginer. Nus sur la plage, bon, il reconnaît qu'en fait ça ne l'a pas gêné et que c'est plutôt agréable. Dans le bois et la rivière, pendant leur "voyage", avec Morgane, pas de problème non plus, il s'est habitué tout de suite. Mais dans le château ça lui faisait un drôle d'effet. C'est vrai que Morgane a dit qu'elle non, qu'ils étaient naturistes. Et Papa lui avait expliqué que dans un camping naturiste on pouvait rester nu tout le temps. Et Morgane, dans son rêve, elle dormait toute nue. Tout ça est nouveau pour Kévin, mais après tout pourquoi pas ?



Ils ont découvert le camping ensemble. Puis ils sont allés sur la plage, en face, pour attendre le Comte et la Comtesse. Pour faire plaisir à Morgane, ceux-ci ont invité Kévin à déjeuner avec eux, et ses parents le lui ont permis.


- Mais attention ! a dit Maman. Ne va pas au soleil sans ton tee-shirt et ta casquette !


- On n'ira pas au soleil, c'est promis, a dit Morgane. On va manger sur la terrasse à l'ombre et après on lira dans ma chambre. Tu veux bien Kévin ?


Pour l'instant, c'est évident, Kévin veut bien tout ce que veut Morgane et quand, sitôt arrivée chez sa mamie, qui les a accueillis en paréo, elle lui a dit, en laissant tomber le sien et son maillot avec : "Tu peux te mettre à l'aise, on reste à l'ombre, attends-moi je vais faire pipi !" il s'est déshabillé en s'étonnant d'être "à l'aise", en effet.


Après le déjeuner, le ventre sur la descente de lit ils ont lu ensemble les Contes de Perrault dans un grand album. Ils les connaissaient déjà mais Morgane avait envie de les relire avec Kévin.


- Tu te rappelles ? a-t-elle dit. C'est toi qui as pensé à faire comme le marquis de Carabas !


Mais quand ils sont arrivés à la fin du "Chat Botté",


- Quand même, a-t-elle observé, le fils du meunier qui se fait passer pour marquis pour épouser la princesse, ce n'est pas très correct.


- Tu dis ça parce que tu es la fille d'un comte ! a répondu Kévin. Tu sais, moi, mon père il est ouvrier !


- Ça n'a rien à voir ! a protesté Morgane. Moi, ce qui me plaît pas c'est seulement qu'il lui ment. Quand on s'aime, on doit pas se mentir.


- Tu as raison, a reconnu Kévin. Moi je te mentirai jamais.


Elle a bien compris que ça veut dire qu'il l'aime, là, en vrai, pas seulement dans leur voyage. Elle lui sourit et elle dit :


- Moi non plus.


Et tandis qu'il est sur un petit nuage elle propose :


- On lit "Le petit Poucet" ? Moi les histoires d'ogre, forcément, ça m'intéresse !


Et quand ils ont fini, c'est Kévin qui dit :


- Et l'ogre qui tue ses filles, tu trouves ça bien toi ?


- Ben non ! Bien sûr c'est sa faute : il avait qu'à pas vouloir tuer les garçons. Mais quand même, ses filles il les aimait, il était pas complètement méchant. Et puis elles, elles avaient rien fait !


- Ce serait bien si on pouvait changer la fin, conclut Kévin. Regarde l'histoire de ta famille, à nous deux on l'a changée, la fin.


- Oui, mais l'histoire de ma famille c'était du vrai. Là c'est des contes !



Et puis un peu plus tard tout le monde s'est retrouvé sur la plage libre. Morgane et Kévin ont joué ensemble dans l'eau et sur le sable. Et puis tout de même il a fallu se séparer, en se donnant rendez-vous au lendemain.


Le soir, dans la tente, Kévin avait chaud dans son sac de couchage. Il a pensé à Morgane qui devait sûrement dormir toute nue. Il a dit :"Pourquoi pas ?", à haute voix, il a ôté son pyjama et il s'est endormi.



A bientôt pour la suite !




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