vendredi 22 août 2008

Le garçon à l'ombre 2


Dans la soirée, on a installé nos affaires, puis Papa nous a montré sa carte d'état-major, en nous expliquant comment on avait noyé la vallée pour faire le barrage.


Avant de se coucher, on a encore regardé un moment le lac, qui brillait sous la lune, puis j'ai laissé Isy fermer les volets, et elle a sursauté parce que, juste devant elle, quelque chose venait de s'envoler.


- Qu'est-ce que c'est ? a-t-elle crié en se jetant en arrière.


- Sûrement une chauve-souris, ai-je répondu depuis mon lit. Je savais pas qu'il y en avait ici. Je vais pouvoir les observer, j'adore !


- Pas moi !


- Allez, t'en fais pas, les petites bêtes mangent pas les grosses, et celles-là sont sûrement toutes petites. Allez bonsoir froussarde !


- Bonsoir, héros sans peur et sans reproche ! T'as de la chance que j'aie sommeil moi aussi, a-t-elle conclu en éteignant la lumière pour se déshabiller.


Mais un moment après elle a dit, comme si on n'avait pas arrêté d'en parler :


- C'est quand même une drôle d'idée d'aller construire un chalet là où il n'y a jamais de soleil. Tu crois qu'il y a quelqu'un qui y habite ?


Plus curieuse qu'Isy, je crois pas que ça existe. J'ai répondu :


- J'en sais rien, et je m'en fous ! Dors !



Mais le lendemain matin, sitôt réveillée Izy s'est précipitée à la fenêtre pour voir si le paysage correspondait bien à la carte. Ça veut dire qu'elle m'a réveillé en ouvrant les volets. Moi, j'aurais bien dormi encore un peu, mais Isy avait manifestement décidé que ça suffisait, alors c'était pas la peine d'essayer


- Viens voir, espèce de marmotte ! elle m'a dit. Elle était géniale, la leçon de Géo de Papa. Tu vois, à droite, c'est l'Est, c'est la pointe du lac, avec le petit ruisseau qui arrive sous les arbres. Le soleil est encore derrière les crêtes. À gauche notre cap avec juste le sommet éclairé. Tout notre morceau de lac dans l'ombre, et en face les deux barres rocheuses, entre lesquelles il doit y avoir le fameux chalet.


Je l'avais rejointe à la fenêtre et je regardais, docilement parce que je n'étais pas encore bien réveillé. Dans ces moments-là, elle en profite pour me faire faire ce qu'elle veut. J'ai quand même réalisé que notre lac était dans l'ombre.


- Y a pas de soleil sur le lac : c'est triste, et il va pas faire chaud.


- C'est supportable ! a protesté Izy, en croisant tout de même ses bras sur son grand tee-shirt de nuit. Et puis, ballot, il va se lever le soleil ! Le temps qu'on déjeune, tu verras !


Et c'est vrai que, quand on a eu fini de déjeuner, la pointe du lac était encore dans l'ombre mais, du côté du cap, il y avait déjà largement de quoi profiter du soleil.


- C'est le meilleur moment pour bronzer, les premiers jours, a dit Maman. Maintenant et en fin d'après-midi. Sinon, on risque des coups de soleil. Papa et moi, on s'étale. Ça ne vous tente pas, les enfants ?


C'était sûrement pour rire ! Elle le sait bien que rester étalés au soleil sans bouger, ça ne nous tente pas du tout.


- Peut-être ce soir, Maman, a tout de même répondu Izy. Pour l'instant, on va faire un tour en canoë, d'accord Had ?


Elle aurait pu me demander avant, mais comme c'était une bonne idée, on n’allait pas se disputer.


- Bon ! a répondu Maman. Mais alors, tee-shirts, casquettes, et écran total sur tout ce qui dépasse, sinon, vous allez le regretter.


Je sais bien qu'elle a raison, mais l'écran total, quelle corvée !


Deux minutes plus tard, le canoë était à l'eau.


- Mets-toi devant, je me mets derrière, a dit Izy.


- Pourquoi ?


- Devine !


- Ah ! Je croyais que tu t'en foutais !


- Je voudrais pas que tu fasses des cauchemars : ça risquerait de me réveiller !


- Tu sais, je crois que je pourrais supporter !


- Trop aimable !


Avant de monter à l'avant, je me suis quand même retourné pour lui sourire. Je la vanne, mais je ne voudrais quand même pas que ça lui fasse de la peine. Elle m'a souri aussi, pas rancunière. En fait, si elle voulait être derrière, c'était pour diriger, je savais bien que c'était ça la vraie raison. Et si ça pouvait lui faire plaisir ...



Comme par hasard, au bout de quelques minutes de navigation dans la partie ensoleillée du lac, on se retrouvait placé de façon à apercevoir le chalet qui n'avait jamais de soleil.


Il n'en avait pas, en effet. De sorte que, pris entre la lumière dont nous inondait le ciel et les scintillements de l'eau, on n'en distinguait pas grand chose. Il aurait fallu s'approcher, entrer dans l'ombre des montagnes d'en face.


Sans rien nous dire, nous avions tous les deux cessé de pagayer. Quelque chose me retenait de franchir la limite de l'ombre. Comme si ça avait été entrer chez les autres sans y avoir été invités. Moi, j'aime pas qu'on viole mon territoire et, d'habitude, je respecte celui des autres. Je suppose qu'Isy devait ressentir la même chose. Mais elle est si curieuse !


- On s'approche ? finit-elle par proposer.


- Comme ça, tout droit ?


- Attends ! On repart à gauche, on s'approche de la barre de rocher et on repart à droite. Comme ça on passe juste devant leur crique sans avoir l'air de vouloir y entrer !


- Curieuse, et en plus hypocrite ! C'est du propre, mademoiselle Isolde !


- Hypocrite toi-même, espèce de Riri ! Tu en as autant envie que moi ! Avoue !


- Allez ! Let's go !


C'est peut-être à cause de la différence de température, mais c'est vrai que, moi en tout cas, j'ai ressenti physiquement une drôle d'impression en entrant dans l'ombre. La rive dont nous nous approchions était plutôt abrupte, sans plage où aborder. Pourtant l'eau n'était pas très profonde, et on pouvait deviner le fond, presque plat, comme Papa l'avait expliqué. Nous avons longé le bord d'assez près. Là, je m'habituais : aucune trace d'habitation, on n'était chez personne. Puis on a commencé à contourner la barre rocheuse qui s'avançait de quelques mètres et nous dissimulait le chalet. Et à nouveau, je n'avais pas la conscience tranquille et mon cœur battait plus fort.


C'est à ce moment, alors que, pour cette manœuvre, on faisait face au centre du lac, que j'ai aperçu un Zodiac qui fonçait vers nous. On avait beau ne rien faire de mal, on n'a pas eu besoin de se concerter pour remettre aussitôt le cap sur notre chalet. Si bien que, quand on s'est retrouvé en position de voir l'intérieur de la crique dans l'ombre, on lui tournait le dos. Pas moyen de faire mieux qu'un coup d'œil ou deux, par dessus l'épaule.


La crique était assez profonde. Au fond, devant un chalet aux fenêtres fermées abrité sous les arbres, il y avait un appontement de bois, et sur l'appontement, une sorte de petite pyramide noire. Au second coup d'œil, je me suis rendu compte que la pyramide se dépliait. Quelqu'un. Quelqu'un enveloppé d'une cape noire, attendant sans doute le canot qui approchait rapidement.


- Iz ! Tu as vu ?


- Oui.


Quand le Zodiac est passé près de nous en ralentissant pour entrer dans la crique, on a pu voir qu'il était piloté par une jeune femme, qui nous a crié "Bonjour", avec un grand geste de la main.


Nous étions à nouveau au soleil, nous dirigeant vers notre plage et, bien que ce geste nous autorisât à la suivre des yeux, l'ombre et la barre rocheuse ne nous permettaient plus de voir l'appontement où quelqu'un l'attendait, enveloppé d'une cape noire.


- Qu'est-ce que tu en penses ?


- C'est bizarre, a répondu Isy. La femme dans le Zodiac, rien à dire. Mais même s'il ne fait pas très chaud à l'ombre, cette cape noire ... Ça a pas l'air vrai ! C'est drôle, on dirait qu'au soleil on est dans le monde normal, en vacances, et que dans l'ombre on serait dans un film fantastique.


Je ne suis pas sûr que j'aurais su le dire comme ça, mais c'était exactement ce que je ressentais.



- Déjà de retour les enfants ? a dit Maman en s'enveloppant dans son paréo. Moi je rentre. Mais vous avez bien l'air rêveur, tous les deux !


Alors on lui a raconté ce qu'on avait vu.


- Le Zodiac, je sais, on l'a vu nous aussi, a-t-elle répondu. Quant au personnage en cape noire ... Il ou elle a sûrement une bonne raison, qui ne nous regarde pas. Au fait, comme vous avez gardé vos tee-shirts jusqu'à présent, si vous voulez prendre encore un peu le soleil, vous, vous pouvez, mais pas trop longtemps : il ne va pas tarder à taper trop fort. Tu ne veux pas te faire un peu bronzer Isy, tu es toute blanche : c'est joli une peau dorée !


- Joli ! Ça dépend ce qu'il y a dedans ! a répondu Isy avec un sourire un peu amer. Va, si ça peut te faire plaisir, je me mettrai à cuire un moment avec toi cet après-midi, mais pour l'instant, je préfère nager. Tu viens Had ?


- D'accord, mais en nageant aussi on peut prendre des coups de soleil. Mettez de la crème, tous les deux !


- Je vais te rejoindre, a dit Papa, mais j'ai envie de jouer un peu avec les enfants, si ils veulent bien de moi.


Si on voulait bien de lui ! C'était dimanche, le seul jour où il pouvait rester avec nous et on a toujours adoré ça. Pendant une heure au moins, on n'a plus pensé au chalet dans l'ombre ni à ses habitants. Même Isy, oubliant presque ses complexes, montait sur les épaules de Papa pour plonger comme quand elle avait huit ans. Enfin presque : elle avait quand même gardé son maillot.


L'après-midi, aux heures chaudes, on a joué à la belote tous les quatre, Maman et moi contre Papa et Isy. Puis on s'est de nouveau baignés puis, comme elle l’avait promis à Maman, pendant que Papa et moi on jouait aux échecs à l'ombre Isy est allée s’allonger au soleil à côté d’elle. Nue aussi, je crois, parce qu’elle est sortie en paréo, apparemment sans rien dessous. Ça c’était vraiment un effort pour lui faire plaisir ! Enfin, la journée a passé comme rien, et c'est seulement le soir, après avoir éteint la lumière dans notre chambre pour se déshabiller, qu'Isy a dit :


- Quand même, je me demande qui il pouvait bien y avoir sous cette cape noire.


- Attends, ai-je répondu, on vient seulement d'arriver : ça m'étonnerait bien qu'on finisse pas par le savoir. Après tout, c'est nos voisins !


Là-dessus, je n'ai pas mis longtemps à m'endormir, et je ne me souviens pas d'en avoir rêvé.




- Qu'est-ce que vous allez faire de votre journée ? a demandé Papa le lendemain matin, juste avant de partir.


- On verra bien. Pour l'instant, on va toujours commencer par un peu de canoë, comme hier, a répondu Isy, certaine que j'étais d'accord.


- C'est bien, ça. Faites en tant que vous voudrez, tant qu'il fait beau : ça va vous muscler et ça ne vous fera pas de mal. Mais attention, ne vous éloignez pas trop, et rappelez-vous qu'un canoë, c'est étroit, donc pas très stable : si on tombe à l'eau au milieu du lac, volontairement ou non, ce n'est pas très facile de remonter dedans. La météo annonce un temps orageux pour cet après-midi : il pourrait y avoir des coups de vent qui risquent de vous faire chavirer. Sur les lacs de montagne, ça fait des tourbillons complètement imprévisibles.


- T'en fais pas, on n'ira pas loin, a assuré Isy. Alors au pire, on pourra toujours revenir à la nage en poussant le bateau ! Ça te fait rien, Maman, si on te laisse un peu toute seule ?


- Ne vous en faites pas pour moi, a répondu Maman. Baignade, bronzage et bouquin, j'ai tout ce qu'il me faut !


- Nage quand même pas trop loin quand tu es toute seule, s'est inquiété Papa.


- Mais ma parole, c'est pas un mari, c'est une mère poule ! Allez, toi fais attention sur la route : elle est plus dangereuse que le lac !



Papa parti, on a voulu faire l'essai de monter dans le canoë là où on n'avait pas pied. C'est vrai que c'est pas évident. On n'arrêtait pas de chavirer. On essayait de se mettre chacun d'un côté, dans l'eau, et de se synchroniser pour se hisser, mais on n'y arrivait pas. Et plus on recommençait plus on riait, ce qui n'arrangeait rien. À s'y prendre de plus en plus mal, on retournait la coque sans pouvoir la contrôler et Maman, qui nous regardait faire, nous a dit d'arrêter, parce qu'on risquait de se blesser sérieusement si on la prenait sur la tête.


Elle avait raison. On a rejoint la plage pour partir comme la veille, moi devant et Isy derrière, sauf que cette fois nos tee-shirts étaient trempés.



Et quelques minutes plus tard, on était à nouveau au milieu de notre pointe de lac, faisant des ronds pour essayer, sans en avoir l'air, d'apercevoir le chalet dans l'ombre. Mais on n'y voyait pas mieux que la veille.


- On refait la manœuvre ? a proposé Isy.


Elle n'avait pas besoin de préciser laquelle, et nous avons commencé à pagayer vers la rive, à gauche de la barre rocheuse. Mais nous n'avions pas encore parcouru la moitié de la distance qui nous en séparait quand nous avons entendu un ronflement de moteur. Cette fois c'est sortant de la petite crique que le Zodiac se dirigeait lentement vers nous.


- Bonjour ! Je peux vous parler ?


La jeune femme accompagnait ces mots d'un geste amical.


Nous avions cessé de pagayer et nous lui faisions face, un peu gênés, bien qu'elle n'eût rien vraiment à nous reprocher. De son côté, elle avait coupé son moteur.


- Bonjour Madame !


- Ne croyez pas que je vous espionne, reprit-elle, avec un sourire qui ne paraissait pas du tout ironique. Mais nous sommes seuls à habiter cette extrémité du lac, alors forcément je vous ai remarqués. Et j'ai aussi remarqué que vous deviez avoir à peu près l'âge de mon fils Ily. Surtout vous, Mademoiselle : il a quinze ans.


- Il s'appelle Ily ? Et elle c'est Isy, c'est drôle comme coïncidence ! intervins-je étourdiment, ce qui me valut de la part de ma sœur un discret coup de poing dans le dos.


- C'est vrai, j'ai quinze ans, moi aussi, dit-elle, en se vieillissant de quelques mois.


- Vous devez penser qu'il aurait pu venir vous rencontrer lui-même, mais en fait il a un problème.


Là, Isy devait être tout de suite intéressée : elle adore les gens qui ont des problèmes.


- Mon fils souffre d'une maladie génétique rare, pas du tout contagieuse, il ne faut pas avoir peur ! Il ne peut pas supporter la lumière du soleil. Il est obligé de vivre presque tout le temps dans une chambre noire, avec juste une lumière rouge, comme chez les photographes. Il ne peut sortir que la nuit. Ou à la rigueur de temps en temps à condition de rester dans l'ombre, entièrement enveloppé dans une cape noire et avec des verres filtrants.


Toujours aussi discrètement, Isy me gratifia d'un nouveau coup de poing dans le dos. La jeune femme semblait attendre une réponse de notre part, mais laquelle ? Nous attendions qu'elle explique où elle voulait en venir. Elle reprit.


- Voilà. Vous pouvez imaginer, il est très seul. Bien sûr, il a ses livres, ses disques, la télé, un ordinateur, mais seulement sa maman comme compagnie réelle, ça n'est pas suffisant pour un garçon de quinze ans. Alors quand je vous ai vus j'ai pensé que peut-être ...


Elle hésitait à finir sa phrase. Isy vint à son secours.


- Mais bien sûr ! Nous serions très heureux de le connaître, n'est-ce pas Had ?


- Bien sûr ! acquiesçai-je sans grand enthousiasme, partagé entre l'appréhension et la curiosité.


- Alors vous voulez bien venir à la maison ?


- Si nos parents le permettent. Nous allons le leur demander !


- Ily serait tellement heureux ! Vous ne pouvez pas imaginer le plaisir que vous me faites ! Si vos parents permettent, je vous en prie, venez bientôt. Venez dès que vous pourrez !


Tandis que, sans rien dire, nous pagayions vers chez nous, elle nous regardait partir : ce n'est qu'au bout d'une minute peut-être que nous entendîmes le moteur du Zodiac redémarrer.


- Tu es d'accord Had ? s'inquiéta enfin Isy.


- Ça te fait plaisir, hein ? Le mystère de la cape noire est enfin résolu, et tu vas faire la connaissance d'un type de ton âge qui a des problèmes ! Pas romantique du tout Miss Isolde ! Allez, oui, je suis d'accord ! Ça nous changera un peu du tête à tête ! Mais quand même, me laisse pas tomber ! Avec lui, on va pas se baigner, et moi, j'aime bien m'amuser dans l'eau avec toi! ... Faute de mieux !


Elle ne releva ni ces derniers mots, ni le fait que je l'avais appelée "Miss Isolde". Il fallait vraiment qu'elle veuille m'amadouer !



Nous avons donc raconté toute l'affaire à Maman. Enfin Iz a raconté, avec des commentaires pour décider Maman à dire oui. Et que ce pauvre garçon, tu te rends compte, ça devait être terrible de toujours vivre dans l'obscurité ! Et que sa mère, vraiment, elle avait l'air tellement gentille, et tellement malheureuse pour lui. Un peu le genre de Maman mais en brune. Oui, peut-être trente-cinq ans, très belle, avec un accent étranger. Un drôle d'accent, quelque chose entre russe et italien. Non, elle n'avait pas parlé du père, elle avait dit "seulement sa maman". Donc le père ne devait pas vivre avec eux, en plus.


- Et toi, Hadrien, tu as envie d'y aller ?


- Moi je suis d'accord avec Isy. De toute façons on fait un essai, si c'est pas sympa, on est pas obligé d'insister .


- Pas vraiment enthousiaste mais d'accord ? Bon. Écoutez, je ne pense pas que votre père sera contre, mais je préfère quand même lui en parler.


- Tu ne peux pas lui téléphoner ?


- Tu as hâte à ce point d'y aller, Isy ?


- Elle avait l’air d’avoir tellement hâte, elle !


- Y a pas qu'elle on dirait ! ai-je fait remarquer.


- Bon, d'accord, moi aussi... C'est peut-être seulement de la curiosité et j'en suis pas vraiment fière, mais j'ai hâte.



Et Maman a téléphoné à Papa. Je ne sais pas si c'était pour faire plaisir à Isy ou parce qu'en général elle la pousserait plutôt à sortir de sa coquille, mais elle a bien plaidé sa cause, et Papa a dit oui.


Je m'attendais à ce qu'Isy se précipite immédiatement sur le canoë, mais là pas du tout. Elle a pris son air le plus raisonnable pour dire :


- La matinée commence à être bien avancée : on ira cet après-midi, si tu veux bien. On fait une partie d'échecs en attendant midi ?


Elle sait que moi, j'adore ça, et je sais qu'elle, bien qu'elle soit capable de jouer très convenablement, c'est pas vraiment son truc. Aucun doute, elle voulait vraiment m'amadouer. Est-ce qu'elle avait vaguement peur que je ne veuille plus l'accompagner ? En fait, moi aussi j'avais envie de savoir à quoi il ressemblait, ce garçon condamné à l'ombre. Mais ce n'était pas la peine de le lui dire : autant profiter de son offensive de charme !



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