samedi 20 juin 2009

Un orage d'avril (2)

- Et si on emmenait Fleur avec nous ? On pourrait la ramener dimanche !

Il y a eu un moment de silence : la proposition avait surpris tout le monde. Puis la maman de Quentin a dit :

- Mais … Ce n’est peut-être pas une mauvaise idée, si elle en a envie et si vous n’y voyez pas d’objection, Mathilde. Nous avons de quoi l’accueillir, soyez tranquille, quand elle habitait en France nous recevions souvent notre nièce, qui a le même âge.

Mathilde, c’est le prénom de Mamie. Bien sûr elle ne confierait pas Fleur à n’importe qui, mais si la maman de Quentin l’appelle comme ça, c’est qu’elles sont déjà bien copines. Donc elle va peut-être lui faire confiance.

- Qu’en dis-tu, Fleur, ça te plairait ? demande-t-elle après un instant d’hésitation.

Fleur non plus n’est pas prête à aller dormir chez n’importe qui, mais avec Quentin …

- Ben … oui, dit-elle.

- Oueh ! jubile Quentin.

Il est si enthousiaste qu’il lui fait immédiatement un gros bisou sur la joue.

- Hé bien va donc préparer tes affaires de toilette et de nuit, dit Mamie. Et n’oublie pas des culottes de rechange ! Prends la mallette qui est dans le placard.

Fleur est un peu gênée que Mamie parle aussi fort de ses culottes devant Quentin, mais il n’a pas eu l’air de faire attention. Après tout, il n’y a pas de raison.

- Peut-être aussi quelque chose d’un peu plus léger pour jouer à l’intérieur, ajoute la maman de Quentin. Ce qu’elle porte là, c’est parfait pour courir la montagne, mais en appartement …

- Je peux prendre mon jogging, madame, propose Fleur.

- Ce sera parfait, dit la maman. Mais tu peux m’appeler Jenifer et mon mari, c’est Bruno. Et tu peux nous tutoyer, ce sera plus sympa, non ?

- Nous sommes vendredi, résume Bruno, nous vous la ramènerons dimanche après-midi. Et ne vous inquiétez pas : si elle ne se plaît pas chez nous, on pourra même vous la ramener demain au besoin.

- Vous êtes sûrs que vous ne voulez pas manger un morceau avant de partir ? a proposé Mamie.

- Nous vous avons déjà trop encombrée comme ça, a répondu Jenifer. J’ai un repas à la maison, que j’avais préparé pour notre retour. Je n’aurai qu’à le décongeler au micro-onde.


Mamie et Chien accompagnent tout le monde jusqu’à la route, au bord de laquelle la voiture est maintenant bien rangée. Fleur et Mamie se font un énorme bisou : depuis qu’elles vivent ensemble, c’est la première fois qu’elles vont être séparées plus d’un jour. Mais aller passer tout un week-end chez Quentin, c’est une aventure trop excitante pour que la petite fille puisse être triste.


Il y avait une bonne heure de route. Mais, occupés à commenter en plaisantant tout ce qu’ils voyaient, Fleur et Quentin n’ont pas vu passer le temps. La petite Léa, dans son siège surélevé, ne comprenait rien de ce qu’ils disaient mais elle riait de les voir rire.

En arrivant, Bruno a mis la table pendant que Jeanne décongelait un plat de spaghettis à la Bolognaise et que Fleur portait sa mallette dans la chambre de Quentin.

- Changez-vous, les enfants, a-t-elle dit. Vous serez plus à l’aise pour déjeuner.

En un rien de temps ils ont tous les deux été en jogging. Celui de Fleur était blanc et celui de Quentin noir. Fleur a plié les affaires qu’elle venait d’ôter et elle a essayé de les ranger dans la mallette.

- Ça ne rentre pas a-t-elle dit. Et en plus j’ai oublié mes pantoufles !

- Pas besoin : ici c’est chauffé par le sol alors on peut marcher pieds nus. Et tes affaires, t’as qu’à les mettre là, a dit Quentin en ouvrant un placard. Tu vois, il y a un lit pliant avec un oreiller et une couette. C’était celui de ma cousine quand elle venait. On y dort aussi bien que dans le mien : j’ai déjà essayé, des fois on échangeait. On échangeait nos affaires aussi des fois, pour rigoler.

- Tu l’aimais bien ta cousine, on dirait, elle doit te manquer !

- Un peu, oui, mais on n’y peut rien, qu’est-ce que tu veux…Mais avec toi, je sais pas si c’est parce qu’on a tout de suite dormi ensemble j’ai l’impression que ça va être pareil qu’avec elle. Et c’est drôle, elle s’appelle Flora. C’est un peu la même chose que Fleur, non ?

- Oui, a dit Fleur en devenant toute rose.

Après le déjeuner, Jenifer a dit à Quentin de montrer la salle de bains et les toilettes à son amie pour qu’elle sache y aller. Fleur a trouvé que la salle de bains était drôlement belle. C’est surtout la douche qui l’a étonnée : ça faisait comme une petite pièce séparée mais sans porte, qui occupait tout un angle.

- C’est pratique, a dit Quentin. On peut bouger sans se cogner les coudes, même à deux.

- Mais … a dit Fleur. La douche, ça se prend pas à deux !

- Papa et Maman, ils aiment bien la prendre ensemble, des fois. Et aussi, quand j’invite un copain, on se marre bien à deux. Tu l’as jamais prise avec une copine ?

- La douche, non, a dit Fleur. Mais le bain une fois. C’est vrai qu’on s’était bien amusées.

- On pourrait peut-être la prendre ensemble ce soir, tu crois pas ?

- Ben … dit Fleur. Avec une copine, je dis pas, mais toi, tu es un garçon !

- Qu’est-ce que ça fait ? Ma cousine aussi c’est une fille, et on la prenait toujours ensemble.

- D’accord, mais c’est ta cousine, vous aviez l’habitude depuis tout petits. Avec moi ça te gênerait pas toi ?

- Moi, non, pourquoi ? Hier soir je me suis bien changé devant toi, et pourtant je te connaissais pas encore mais … je sais pas. T’avais pas l’air chochotte, j’ai pensé que ça te gênerait pas.

- D’abord avec la bougie et la serviette je voyais rien du tout. Sinon, c’est vrai que puisque toi tu étais pas gêné, moi non plus. Mais ça m’a étonnée : moi, à ta place, je crois pas que j’aurais osé. Et alors maintenant tu me trouves chochotte ?

- Non ! proteste Quentin. C’était juste pour dire que moi, avec toi je me sentais comme avec ma cousine. Mais c’est vrai que les autres filles, c’est pas pareil. Si t’as honte, tant pis ! …En fait j’ai aussi un copain qui a honte. Dans le vestiaire de la piscine, on a beau être que des garçons, il fait plein d’histoires pour qu’on voie pas son zizi. Comme si on allait le regarder !

Ils sont retournés dans la chambre. Quentin avait une petite télévision et une PS2 avec un jeu de Eye Toy. Fleur ne connaissait pas ça. Quentin lui a montré comment on faisait et elle a tout de suite particulièrement adoré nettoyer les vitres. Pendant qu’elle jouait, il faisait des galipettes sur la moquette. Il y avait la place : la chambre était plus grande que celle de Fleur.

Quand c’était le tour de Quentin de jouer, Fleur ne pouvait pas s’empêcher de penser à la douche. Il n’avait pas insisté, et elle n’avait qu’à penser à autre chose. Mais elle n’y arrivait pas. Ça lui avait tellement fait plaisir quand il lui avait dit qu’il se sentait avec elle comme avec sa cousine. Et maintenant, il n’avait pas l’air d’être fâché, mais il avait parlé des autres filles, et de son copain qui avait honte. C’est à eux qu’il devait la comparer et plus à Flora qu’il aimait tant. Tout ça parce qu’elle aurait eu honte qu’il la voie toute nue. Et pourquoi donc avait-elle honte et lui pas ? Ils avaient presque le même âge et même lui un peu plus. Est-ce que c’était juste parce qu’il avait l’habitude avec sa cousine alors qu’elle n’avait jamais pris sa douche avec un cousin ? Elle aurait bien voulu que Mamie soit là pour pouvoir en parler avec elle.

- À toi ! a dit Quentin en lui tendant la manette. Essaye de me battre !

Bruno était parti faire le marché, et Léa faisait la sieste. À quatre heures, Jenifer a fait des crêpes et les enfants se sont régalés, puis ils sont repartis jouer. Ils n’ont pas vu passer l’après-midi. C’était incroyable comme ils étaient bien ensemble. Comme s’ils s’étaient connus depuis longtemps. Fleur se disait que ça devait être comme ça, un cousin, ou un frère.

Vers six heures, Jenifer a dit :

- Bon, les enfants, j’aimerais autant que tout soit prêt pour la nuit avant le dîner, comme ça après vous n’aurez plus qu’à vous brosser les dents et vous pourrez jouer sans arrière-pensée en étant prêts à dormir quand vous serez fatigués. Alors on va commencer par faire le lit de Fleur.

- C’est moi qui le déplie, a dit Quentin.

- Et moi je peux le faire si tu me donnes les draps, a dit Fleur.

- Tu sais faire le lit toute seule ? s’est étonnée Jenifer. Bravo ma puce ! Tu devrais en prendre de la graine Quentin !

- Moi je veux bien, a dit Quentin.

Fleur s’est très bien débrouillée, mais Jenifer l’a quand même aidée pour mettre la couette dans sa housse. Puis elle a dit :

- Et maintenant, la douche. Quentin, tu laisses ton amie passer la première : il faut être galant. Fleur, tu trouveras une serviette propre pliée près du lavabo, avec un gant et du gel douche.

- Quentin a regardé Fleur deux secondes et il lui a dit en soupirant :

- O.K. Vas-y !

Mais à ce moment-là Fleur était tellement heureuse, elle avait tellement envie de lui faire plaisir qu’elle a dit :

- Il avait envie qu’on la fasse ensemble mais …il faudrait que je demande la permission à Mamie. Je pourrais lui téléphoner ?

- Quentin ! a dit Jenifer en le regardant d’un air de reproche.

- C’est pas moi qui l’oblige, Maman ! s’est défendu Quentin. Je lui ai juste dit qu’avec Flora on la prenait à deux et que j’aimerais bien que ce soit pareil avec elle, parce que je l’aime bien.

- Et moi ça m’a étonnée parce que j’ai pas l’habitude, mais j’ai bien réfléchi et j’aimerais bien qu’on soit comme des cousins alors si Mamie le permet je veux bien.

- Ah bon ! a dit Jenifer un peu décontenancée… Moi, au fond je n’ai rien contre si vous en avez envie tous les deux mais je ne suis pas sûre que ta Mamie soit d’accord.

On lui a donc téléphoné.

- Allo Mathilde ! a dit Jenifer. Ne soyez pas inquiète, tout va très bien. Mais … les enfants ont comploté quelque chose euh … Je vous passe Fleur.

- Allo Mamie ! …Oh oui on s’amuse bien mais justement, je voulais te demander : est-ce que je peux faire ma douche avec Quentin ?

Il y a eu un moment de silence, puis Mamie a dit :

- Attends, tu peux me repasser Jenifer ?

Jenifer a tout de suite compris qu’il fallait expliquer. Elle a parlé à Mamie de la cousine avec qui Quentin avait pris cette habitude. Elle a dit qu’elle n’avait pas prévu qu’il en parlerait à Fleur, que personnellement elle n’y voyait aucun mal mais que bien sûr elle comprendrait que …

- Moi non plus, a dit Mamie. J’étais un peu surprise parce que ma petite Fleur, elle, n’y est pas habituée du tout. Mais ma foi, si elle est à ce point à l’aise avec votre fils, entre enfants de cet âge je ne vois pas de problème. Fleur et Quentin avaient entendu, parce que Jenifer avait mis le haut- parleur. Quentin a sauté de joie et Fleur a fait une grosse bise à Mamie au téléphone, puis ils sont partis vers la salle de bains.

En cinq secondes Quentin était tout nu. Fleur a mis un peu plus longtemps. Au moment d’enlever sa culotte, elle regrettait un peu que Mamie n’ait pas dit non. Mais Quentin avait tellement l’air à son aise et pas du tout occupé à la regarder qu’elle s’est quand même vite décidée à le rejoindre sous la douche. Quentin se lavait d’abord les cheveux puis le reste du corps avec la mousse. Fleur, elle, se lavait avec le gant en essayant de ne pas se mouiller les cheveux. C’était amusant de se savonner mutuellement le dos, puis de s’arroser avec la douchette pour se rincer. Mais garder les cheveux secs dans ces conditions n’était pas vraiment facile. Leurs éclats de rire résonnaient dans les murs couverts de carreaux de la salle de bains et ils ont bien fait durer le plaisir …

Ce n’est qu’en se séchant qu’ils se sont aperçus que, du salon où était le téléphone à la salle de bains ils n’avaient pas pensé à repasser par la chambre pour prendre leurs affaires de nuit.

- Comment on fait ? a dit Fleur en pouffant de rire. On y va avec les serviettes ?

- Oh non ! a dit Quentin. Après il faudra les rapporter et si on oublie Maman va nous gronder. On a qu’à y aller comme ça !

Il a ramassé son jogging et il est parti tout nu vers la chambre. Et Fleur l’a suivi, en riant parce qu’elle avait l’impression de faire quelque chose de pas défendu, non, au point où on en était, mais d’un peu fou tout de même.

Quentin a enfilé son pyjama et Fleur sa chemise de nuit.

- C’était pas bien ? a dit Quentin.

- Supergénial, a dit Fleur.

- On recommencera demain ?

- Bien sûr !

Aucun commentaire: