vendredi 14 août 2009

Loreleï 1

Là, franchement, Patrick a poussé le bouchon un peu loin. Piégée. J’ai horreur d’être piégée et qu’est-ce que je pouvais faire ? Aurais-je dû renoncer à mes vacances avec Marc pour exiger le retour d’Enzo ?

Dans le fond, c’est vrai que ce n’est peut-être pas si grave. Enzo a l’air d’avoir pris ça avec son sens habituel de la distanciation. Étonnant pour son âge. Mon gamin si pudique environné de gens à poil, franchement, je n’aime pas ça mais… Un bon point pour cette … Valérie, je crois : c’est elle qui a exigé que Patrick m’appelle et à part les petits – au fait, quel âge au juste les petits ? – Enzo n’a vu personne nu avant. Les voir nus, Patrick et elle … Bon, elle a donc l’air raisonnable et Patrick ne voudrait pas exposer son fils à … Du moment qu’on ne lui demande pas de faire comme eux. « Chacun fait comme il veut », bonne formule : lui, je sais ce qu’il ne veut pas !

… Et s’il se laissait gagner par la contagion ? Il a tellement l’air de se plaire avec eux ! « Chacun fait comme il veut … » au fond je n’ai rien défendu ! Mais le pouvais-je ? Quel personnage ça m’aurait fait jouer !... Au pire, il finira par faire comme eux. Quoique quand la grande sera là … Ma foi, après tout ce n’est qu’une histoire de vacances : à Paris ils ne vivent pas tout nus que je sache, alors si dans ce cadre-là il en venait à mettre sa quéquette à l’air pour faire comme eux … À la rentrée on n’en parlerait plus et personne n’en mourrait !

L’enthousiasme avec lequel il parlait d’eux quand il est rentré après sa première visite ! Je dois avouer que j’en ai ressenti un peu de jalousie. Il a grandi seul avec moi, à part les visites chez son père. Sans doute aurait-il aimé avoir des frères et des sœurs. Peut-être était-il temps de sortir de ce tête à tête si intime et dont j’ai pourtant veillé à écarter toute promiscuité. À moins que je ne me donne cette excuse pour avoir, depuis quelques mois déjà, commencé à le rompre pour mon compte sans rien lui en dire. Et j’avais l’impression de le tromper. Mon fils !

Alors pour ces vacances, les calendriers qu’on avait pu miraculeusement faire coïncider, moi chez Marc et Enzo avec son père dans cette famille à laquelle tous les deux semblent vouloir se lier, quelle aubaine ! Et peut-être, si j’avais su qu’elle était naturiste aurais-je reculé, dût ma relation avec Marc en souffrir. Mais faire machine arrière maintenant est à peu près impensable. Enzo y gagnera de s’émanciper plus que n’aurais osé le lui permettre, alors qu’il est si raisonnable !

Marc … Une relation professionnelle d’abord avec l’encore jeune et brillant député d’une circonscription auvergnate. Dès le début il m’a draguée sans vergogne. Il est vrai qu’il est veuf et que je suis divorcée : où est le mal ? Et peu à peu, moi qui depuis des années ai renoncé à toute relation sexuelle pour me consacrer à mon fils, je me suis laissé séduire par son intelligence, sa persévérance, son charme physique aussi, pourquoi le nier ?

Il est vrai qu’avant lui, les relations sexuelles n’étaient pas précisément ma tasse de thé. Patrick avait été mon premier partenaire et, peut-être parce qu’il n’avait pas non plus une grande expérience, ça n’avait jamais vraiment été l’extase. Nous nous sommes mariés quand même parce que j’étais enceinte et que mon éducation catholique m’interdisait l’avortement. D’ailleurs nous étions sincèrement amoureux je crois, et plutôt heureux que cet enfant nous forçât en quelque sorte la main. Nous pensions que le reste suivrait. Mais après la naissance mon appétit sexuel était plus discret que jamais et je ne peux pas vraiment en vouloir à Patrick d’être allé voir ailleurs s’il trouvait des partenaires plus coopératives. Et celui à qui j’ai eu par la suite la sottise de céder sans amour juste pour lui rendre la pareille ne m’a pas davantage comblée. Un souvenir dont je ne suis pas fière.

Et puis avec Marc … L’art de la mise en scène, des préliminaires savourés avec une gourmandise patiente et attentive … Le sentiment que j’avais aussi, avec lui, d’entrer dans un monde interdit, délicieusement pervers, par lequel je ne me serais jamais crue attirée …

Lorsque je m’efforce d’y penser avec lucidité, j’avoue que pour qualifier ma relation avec lui, j’hésite entre amour et addiction. Mais à tout prendre, l’amour n’est-il pas une addiction ?

Lâcher prise un moment … Oublier la pudeur que j’ai inculquée à mon ange, moi qui me découvre depuis quelques mois capable d’impudeur. Trois semaines à me laisser aimer… À me laisser du moins guider dans cette croisière immobile au cœur de la volupté qu’il me promet, car au fond m’aime-t-il ? Aime-t-il autre chose en moi que cette initiation qu’il me délivre. Curieux mot qui me vient à la recherche du verbe approprié : de quoi me délivre-t-il ? À quoi m’enchaîne-t-il ? Et que deviendrai-je s’il se lasse de moi, moi qui ne serai plus jamais la même ?

Une semaine est passée. Enivrante. Chaque jour il m’emmène visiter l’un des sites intéressants de la région, qu’en bon député il connaît comme sa poche, nous déjeunons dans un bon restaurant et lorsque nous rentrons, comme par magie le ménage a été fait et le repas préparé pour le soir. Et surtout il sait si bien être à mon écoute, me donner de la tendresse lorsque j’en ai besoin, de la volupté lorsque j’en ai envie, une stimulation intellectuelle et esthétique aussi : les musiques éclectiques dont il emplit sa demeure, les images accrochées aux murs. Des photos qu’il a faites, avec un vrai talent. De la beauté pure. Encore que « pure » ne soit peut-être pas le mot : rien de pornographique dans ses nus mais un érotisme perceptible. Discret mais présent. Après tout pourquoi l’érotisme serait-il forcément impur ? J’ai pris quelque distance avec mon éducation catholique, sans d’ailleurs la rejeter en bloc, mais il est certain que le conditionnement reste, tapi quelque part au fond de mes jugements esthétiques.

Tout de même certaines photos, incontestablement belles dans un noir et blanc jouant avec une virtuosité fascinante sur les contrastes de l’ombre et de la lumière, me gênent quelque peu à cause de l’âge apparent des modèles. Une jeune fille en particulier, omniprésente, du début de la puberté à une adolescence confirmée. Il me dit qu’il s’agit de sa fille.

Il ne m’en avait jamais parlé. À seize ans, l’âge qu’elle paraît sur la photo la plus récente, elle vient d’obtenir un bac littéraire avec mention très bien et campe pour l’instant en Espagne avec un groupe de copains, en attendant d’intégrer une hypokhâgne parisienne.

Les photos de nu, l’Espagne où l’on m’a dit que le naturisme est monnaie courante sur les plages, la pensée jamais absente des vacances d’Enzo s’associent dans ma tête. Je le lui dis.

- Naturiste ? Ah non, quelle horreur ! Ce n’est pas la nudité en soi qui me choque. Mais ces étalages de viande au soleil ! Encore si la viande était toujours fraîche … Mais la beauté ne fait paraît-il pas partie de leurs exigences. Et ça se voit ! Ma Loreleï n’aurait pas ce mauvais goût ! Non, simplement, j’ai commencé à la photographier nue toute petite – je te montrerai l’album – et j’ai continué à mesure qu’elle grandissait : le modèle m’inspirait, je l’avais sous la main et la continuité de l’habitude a sans doute fait que cela ne l’a jamais gênée. Tu penses bien que si j’avais ressenti la moindre réticence je n’aurais pas insisté !

Il n’empêche, moi qui ai pris si grand soin de respecter, et même d’encourager la pudeur de mon fils, j’ai un peu de mal à le suivre. Et surtout il y a une photo, particulièrement belle mais … Ici le contraste entre noir et blanc s’incarne dans les modèles. Deux très jeunes adolescentes semblent au terme d’un assaut de lutte, les bras de l’une que l’on voit de dos à genoux, presque assise à califourchon sur le ventre de l’adversaire, prenant appui sur les poignets de celle-ci qu’elle tient cloués au sol, de part et d’autre de la chevelure qui s’y étale, pour y maintenir ses épaules. Celle qui a le dessous est la blonde Loreleï, l’adversaire victorieuse une jeune noire aux cheveux courts.

- Celle-là te gêne ? Je te raconte. La petite noire était la meilleure amie de Loreleï. Au matin d’une pyjama partie elles s’étaient amusées à lutter sur le tapis du salon et quand je les ai vues dans cette position j’ai bondi sur mon appareil.

- Mais … Ce n’est pas cette photo !

- Non ! Juste un instantané que je dois avoir quelque part dans mes archives. Mais j’ai eu envie de reproduire la pose en retravaillant la mise en scène et les éclairages. Loreleï a accepté l’idée d’enthousiasme et elle a convaincu son amie. Tu n’aimes pas le résultat ?

- C’est beau ! Mais les filles nues et non plus en pyjama, un drap froissé à la place du tapis, même si on ne voit pas les sexes et à peine un sein de ta fille, ça change tout. Et puis surtout, ce que son visage exprime, ce n’est plus du tout la joyeuse excitation d’un jeu d’enfants. Regarde !

- Tu crois ? Tu as peut-être raison : je n’avais pas remarqué. Tu sais, avec le noir et blanc, tu as pu t’en rendre compte, je travaille en quelque sorte en sculpteur. Les formes, les reliefs plus que l’expression des visages … Les yeux des statues antiques sont vides ! C’est vrai que le regard de ma fille ici … Elles étaient très liées tu sais, et Loreleï était reconnaissante à son amie d’avoir accepté le jeu. Mais c’étaient encore des enfants !

- Loreleï ! C’est un joli nom, dis-je pour chasser le léger malaise que ses explications n’ont pas dissipé.… Et original pour une Auvergnate !

Et j’ai aussitôt honte de proférer de pareilles banalités.

- En fait elle s’appelle Laure. Mais sa mère, qui était férue de mythologie rhénane, lui avait donné ce diminutif et il lui est resté.

Devant la cheminée éteinte, nous avons rejoué la scène, lui et moi, sur le tapis du salon et, bien sûr, elle n’a été qu’un prélude …

J’ai rappelé à Marc sa promesse de me montrer les instantanés de son album de famille. On y voit la petite habillée dans les bras de sa mère, en qui j’ai reconnu un autre des modèles vus sur les murs, puis nue, classiquement sur un coussin, dans une sorte de parodie sépia des photos anciennes. Puis des clichés de deux sortes, radicalement différentes. La première n’a rien de très original : l’enfant et sa mère, en couleurs, dans des situations banales. La seconde est de la veine des agrandissements en noir et blanc. L’enfant et sa mère encore, mais nues, dans des poses et sous des éclairages témoignant d’une recherche esthétique du reste généralement aboutie. Les contrastes, déjà, dont le photographe aime à jouer : la mère est aussi brune que l’enfant est blonde.

- Presque tous les enfants naissent blonds, me répond Marc lorsque je m’en étonne.

- Mais ta fille l’est restée si j’en juge par les photos récentes.

- Sans aucun artifice, oui. Un héritage venu de ma famille à moi.

Cliché après cliché l’enfant grandit et je ne puis m’empêcher de penser que, malgré sa blondeur angélique et son visage paisible, malgré le sexe toujours caché ou à tout le moins dissimulé dans l’ombre, ces photos posées et mises en scène ne respirent pas l’innocence. Celle-ci en particulier, où, âgée sans doute d’une dizaine d’années, elle semble dormir, la tête sur un avant-bras enfoui dans l’oreiller, la jambe droite étendue à demi couverte par le drap froissé qui laisse nues les fesses presque entièrement et la jambe gauche repliée, le genou à hauteur de la hanche, la lumière venant apparemment des persiennes, plus haut et sur la droite, rayant l’image transversalement des pieds au milieu du dos. A quoi cela tient-il ? De ce corps, quoique endormi et encore enfantin, se dégage une impression de sensualité.

- La sensualité, me murmure Marc, ne serait-elle pas dans ton regard d’aujourd’hui, à cause de l’atmosphère dans laquelle nous vivons tous les deux ?

Peut-être… Et je songe que je n’ai jamais dormi nue si ce n’est après l’amour. C’est peut-être ce qui fait que je ne peux voir un corps nu dans un lit défait sans y associer des connotations érotiques.

J’ai eu Enzo au téléphone. Il ne m’a pas caché qu’il avait abandonné le bermuda. Cela n’a pas tardé : j’aurais cru que sa pudeur résisterait davantage. Mais qu’est devenue la mienne ? Et en ce qui le concerne, lui, cela paraît bien être en toute innocence. Peut-être après tout les naturistes ne sont-ils pas les pervers que j’imaginais. Mon ange a bien l’air parfaitement heureux en tout cas. Et pour ce qui est de l’étalage de viande au soleil dont parle Marc, trois enfants et deux adultes jeunes … Patrick n’est pas laid et je n’ai jamais vu Valérie mais Enzo la trouve très belle. De la « grande » de douze ans qui doit les rejoindre il parle avec enthousiasme. Rien de laid donc. Mais il est aussi question des grands parents qui doivent revenir pour la quatrième semaine et là … Quoi qu’il en soit il est clair que je ne comprends pas grand-chose à ce monde-là, qui m’est étranger, et Marc non plus sans doute. Il ne me reste qu’à leur faire confiance.

Il m’a dit que les petits et lui dorment nus dans la même chambre. Et la photo de Loreleï endormie me revient à l’esprit. Si je m’efforce d’imaginer mon fils à la place de cette fillette, trouverai-je encore de la sensualité dans ce cliché ? Il est vrai qu’il n’y aurait pas cette chevelure blonde étalée sur l’oreiller. Mais si je m’efforce d’être logique, où est donc la sensualité ? Dans les fesses dénudées ou dans les cheveux, dont notre morale occidentale ne censure pas l’image ?

Marc m’annonce une nouvelle inattendue et c’est la première fois que je le vois embarrassé. Les vacances espagnoles de sa fille ne se passent pas aussi bien que prévu et la voilà qui demande la permission de rentrer au bercail. Elle se doute bien que son père n’y est pas seul mais n’y voit rien à redire et promet de se faire toute petite. Cela me contrarie, évidemment. D’une part je ne déteste pas l’idée de faire la connaissance de cette adolescente à l’intelligence manifestement précoce et, si l’art du photographe ne l’a pas trop avantagée, à la beauté émouvante. Ni d’entrer ainsi dans une intimité de l’homme que j’aime plus vraie que celle qu’il met en scène pour moi. Mais en même temps j’appréhende que la magie de ce tête à tête voluptueux en soit rompue.

Loreleï est arrivée hier. Aussi belle que sur ses photos, la vie en plus. Aussi discrète qu’elle l’avait promis aussi : depuis qu’elle est là elle a passé le plus clair de son temps dans sa chambre. Mais dès qu’elle est avec nous sa présence est extraordinaire. La grâce naturelle de ses attitudes, la mobilité de son visage au fil de ses paroles créent une sorte de fascination qui capte l’attention, un halo qui rejette dans l’ombre tout ce qui n’est pas elle.

J’ai fait part à Marc de mon admiration. Il a souri, comme je souris sans doute quand on me complimente sur Enzo. Il m’a dit :

- Tu comprends maintenant pourquoi je ne me lasse pas de la photographier ?

J’ai répondu que, si parfaitement beau que soit son corps, c’est son visage qui, si j’étais photographe, m’inspirerait quant à moi mille portraits.

- Je comprends qu’il te fascine, m’a-t-il dit. Mais vois-tu, la photo ne fait pas grand tort au corps en l’immobilisant alors que le visage… Si je savais comment mettre dans un seul portrait les mille expressions qui animent le sien je le ferais peut-être. Mais peut-être aurais-je peur d’être indiscret. Dans la mesure où le visage en dit plus sur une personne que son corps, je me demande si le portrait n’est pas quelque part plus impudique que le nu.

Ce paradoxe m’a laissée rêveuse.

- Ton enthousiasme pour ma fille, a-t-il repris en souriant après un temps, ravit à la fois ma fierté et mon amour de père, mais j’aimais bien que tu ne t’intéresses qu’à moi. Je vais devenir jaloux !

Nous avons donc cessé de parler d’elle pour n’être bientôt plus occupés que de nous.

Si la présence discrète de Loreleï ne me gêne finalement pas, la réciproque semble vraie Dès l’abord cordiale à mon égard, elle s’est faite insensiblement amicale, j’allais dire affectueuse. Je lui rappelle sa mère, me dit-elle, qui devait avoir à peu près mon âge lorsqu’elle l’a perdue, il y a six ans. Je n’ai pas encore osé, de peur de raviver des souvenirs douloureux, demander la cause de cette mort prématurée. Il est vrai que nous avons la même longue chevelure brune, la même silhouette à peu près.

- Depuis six ans, Papa ne peut plus nous photographier ensemble, dit Loreleï alors qu’ensemble nous regardons les clichés accrochés aux murs.

Elle se tait un moment puis reprend :

- Oubliez tout de suite ce que je vais vous dire si cela vous choque : je suis un peu folle, vous savez ! Vous accepteriez qu’il nous photographie toutes les deux ?

- C’est que …

J’ai la vague impression qu’il y aurait quelque chose de malsain dans cette substitution. Et puis c’est probablement à une photo où nous serions nues qu’elle pense. Je regarde Marc … Il me sourit.

- Honnêtement, je trouve l’idée merveilleuse. Tu sais, si c’est la nudité qui te gêne, la position et la lumière peuvent faire qu’on ne puisse pas te reconnaître !

Avec Marc j’ai dépassé toute pudeur et quant à sa fille, nous pourrions nous rencontrer nues dans les vestiaires d’un club de sport comme celui que je fréquentais autrefois. Si je refuse il sera déçu. Je dois être rouge comme une gamine quand je dis :

- Si ça vous fait vraiment plaisir à tout les deux … Mais … Enfin tu sais ce que je veux dire.

- Je crois, ma chérie.

- Tu es un amour ! Pardon, tu permets que je te tutoie ? dit Loreleï en prenant ma main pour la baiser.

- Bien sûr !

A-t-il peur que je me ravise ? Marc est allé chercher son matériel sans perdre de temps et le salon se transforme bientôt en studio.

- Je voudrais vous prendre debout devant ce mur de pierre sombre. Loreleï de face, toi de dos la cachant à moitié, toutes deux les cheveux défaits. Tu imagines ? Ça te convient ?

Loreleï a commencé à se déshabiller et je me décide à l’imiter en m’efforçant de dissimuler ma gêne. Par cette soirée d’été nous ne portions l’une et l’autre que de longues tuniques qui ne laissent pas de marques sur la peau. Marc nous place avec des gestes de professionnel. Il règle les lumières de façon à éclairer seulement sa fille, qui n’a guère dû fréquenter la plage en Espagne car sa peau de blonde est uniformément blanche. Il lui demande de prendre ma main droite dans sa main gauche afin qu’elles cachent son sexe, également blond, dans un mouvement naturel, et de passer devant son épaule gauche toute sa chevelure. Elle masquera en partie son profil que, pour mettre en relief son contraste avec la mienne, il lui a demandé de tourner vers moi comme si elle chuchotait quelque chose à mon oreille. Pour l’objectif le côté droit de son corps sera entièrement masqué par le mien. Nos seins droits et nos genoux s’effleurent.

Ouf ! La photo est prise et nous pouvons quitter la pose. J’ai le feu aux joues. Loreleï me sourit et tarde un peu à lâcher ma main. Puis elle me prend par les épaules et m’embrasse sur les deux joues comme une enfant :

-Tu as été géniale, Marie-Odile ! Je t’adore !

Et tandis que je me dépêche de remettre ma tunique elle s’attarde un instant à aider son père qui range son matériel avant de remettre la sienne. Marc caresse ses cheveux et l’embrasse sur le front. Rien que de très innocent. Pourquoi ne suis-je pas capable de vivre cela sans trouble ?

Aucun commentaire: