Procrastination … C’est grave, docteur ?
Il est super, ce gamin, et bon, finalement on a trouvé un modus vivendi acceptable. Et peut-être évolutif. Mais quand même, il m’a un peu inquiétée. Pas le mot, il se trouve que je le connaissais, mais la chose. Jusqu’à présent je n’ai pas remarqué ça chez Patrick, mais après tout, entre nous c’est encore un peu la lune de miel : ça ne rend pas forcément lucide !
Procrastination … Moi, je crois vraiment pouvoir dire que ce n’est pas mon genre. Avec un boulot à plein temps et trois enfants à élever pratiquement seule, il vaut mieux pas. Et avec Patrick, jusqu’à présent je trouve qu’on est plutôt synchrones. Synchrones au lit et ça compte, c’est sûr, mais pas seulement. En fait c’est même pour ça qu’on a fait connaissance.
Dans le parking de la station, au mois de février, en Savoie, l’angle mort dans les rétros et deux marches arrière trop bien synchronisées !
Je passe quelques jours chez ma sœur, avec les deux petits, qui dorment encore, avec leurs cousins. Noémie est dans une autre station, avec son père, tellement heureuse de l’avoir pour elle toute seule pendant une semaine. Véro m’a prêté sa voiture pour aller chercher des croissants et bing ! Ça n’a pas l’air grave, mais ça m’embête.
Il est sorti de sa voiture en même temps que moi.
- Une femme au volant ! J’en étais sûr ! Non, je plaisante, excusez-moi, j’ai au moins cinquante pour cent de torts … comme dans mon divorce !
Il me regarde, souriant, ouvert. Il me regarde comme les hommes regardent les femmes quand ils les trouvent jolies. Les hommes bien élevés. Ce n’est pas désagréable. Je coupe :
- Cinquante cinquante, ça paraît évident. Bon, on se range et on entre dans la cafétéria pour le constat ? Parce que là on gêne !... Et on gèle !
Nous avons rempli les imprimés en prenant un café. Les dégâts étaient assez légers, mais j’étais tout de même ennuyée parce que la voiture était à ma sœur. Quand il l’a compris il m’a proposé de prendre tous les torts :
- J’ai une « tous risques », ça ne devrait pas faire une grosse différence, en plus nous avons le même assureur, donc ça ne fait de tort à personne !
J’ai refusé : par principe je n’aime pas tricher. Mais c’était gentil quand même de sa part.
Il était clair qu’il faisait tout pour prolonger la conversation et j’avoue que ça ne m’aurait pas déplu, mais Véro et les enfants, qui doivent être réveillés maintenant, attendent les croissants. Je le lui dis.
- Oh, alors, si les enfants attendent…
Il sourit. Non : il n’y a pas mis d’ironie. Il continue :
- Mais ce soir, si je vous invite à dîner ?
Je suis tentée. Il est sympathique, pas mal de sa personne et après tout, je suis libre. Enfin presque … Il a perçu mon hésitation.
- Vous n’avez pas dit non, donc j’espère que vous avez envie de dire oui mais vous ne pouvez pas vous décider comme ça. D’accord ? Alors moi, ce soir, à partir de … disons huit heures, je suis ici et je vous attend.
- Et si je ne viens pas ?
- Laissez-moi la journée pour en rêver ! Comme ça, si vous ne venez pas je n’aurai pas tout perdu !
J’ai évidement raconté tout ça à Véro et … à vrai dire elle m’a poussée dans le sens où j’avais envie de tomber. Depuis que Daniel, le père des petits, m’avait plantée là, c’est vrai que ma vie sentimentalo-sexuelle était du genre désertique. Quelques petites oasis quand même, je ne suis pas une nonne, mais que je n’avais pas vraiment été tentée de cultiver, même quand le partenaire ne m’avait pas déçue. L’impression de voler du temps à mes trois amours. J’exagérais peut-être. C’était peut-être un peu pour ça que Daniel était parti : au fond il était jaloux des enfants. Et avec celui-là ce serait peut-être pareil. Probablement, à vrai dire, même si les enfants, il avait admis tout de suite leur priorité. Une habileté de dragueur ? Possible. Mais enfin, si nous en avions envie tous les deux, pourquoi nous en priver ? D’autant qu’après tout il n’était pour l’instant question que d’un dîner et que voir si « plus si affinités »… ou pas, c’était bien à cela que ça servait, ces dîners-là.
Je l’ai donc retrouvé à la cafétéria à huit heures du soir. Pile. Il m’attendait. Il a regardé sa montre et m’a dit en souriant :
- Chapeau ! Ce n’est pas tous les jours qu’on rencontre une princesse qui a la politesse des rois. On se fait la bise ?
- Pourquoi pas. Mais juste deux choses. Un, j’aime bien être à l’heure : la coquetterie, ce n’est pas mon truc …
- Mais l’élégance, oui ! m’a-t-il coupée
- …et deux vous arrêtez le baratin à deux balles, ce n’est pas mon truc non plus.
Il a éclaté de rire.
- Moi non plus, comme vous voyez, je n’y suis pas très brillant ! Mais décidément, Valérie (c’est bien Valérie ? C’est ce que vous avez écrit sur le constat.), vous dire que vous me plaisez de plus en plus, vous me le permettez ?
- Si vous me promettez qu’on va parler d’autre chose. D’accord ?
- De vous alors ! Je sais déjà que vous avez une sœur et que les rétros de sa voiture laissent un angle mort comme les miens. Et des enfants. Des enfants dont le père ne vous empêche pas d’être là ce soir. Vous voulez qu’on parle de vos enfants ? On va peut-être commencer par voir le menu ?
- Quelle association d’idées ! Vous me faites frémir !
- Ah non ! Non ! J’aime beaucoup les enfants mais je ne suis pas un ogre ! D’ailleurs j’ai un fils, moi aussi.
C’est comme ça que ça a commencé, avec Patrick, il y a cinq mois et … nous voilà en vacances ensemble, dans la maison de mes parents, avec mes poussins et son fils.
Procrastination … Je n’aimerais pas qu’il soit velléitaire. Un peu truqueur plutôt, capable de donner du temps au temps si c’est à son avantage, mais il sait aussi se décider vite. La preuve…
Aux vacances de printemps, la seconde semaine, Noémie était chez son père et mes parents m’avaient demandé de leur envoyer les poussins. Véro avait dû leur en souffler l’idée, telle que je la connais. Quand j’en ai profité pour inviter Patrick à passer quelques jours chez moi, il s’est débrouillé sans problème pour être libre. Avant de retourner chez lui, c’est lui qui a insisté pour que je me décide à le présenter à mes enfants : là, c’est moi qui remettais. Et quand je lui ai donné rendez-vous à Héliomonde il a juste dit :
- À Héliomonde ? Ça, c’est pas banal pour faire connaissance ! Toi au moins, on peut dire que tu aimes quand on ne se cache rien ! Plaisanterie à part, tu m’avais pas encore dit que tu étais naturiste. Et tes enfants aussi, donc ?
- Ça te pose un problème ?
- Aucun.
- Je m’en doutais. C’est sans doute pour ça que je n’avais pas senti le besoin de t’en parler.
Il a ri.
- C’est drôle, moi c’est plutôt quand il y a un problème que j’aurais tendance à ne pas en parler. Décidément, tu vaux mieux que moi. Je t’adore.
Et c’est vrai que le rendez-vous à Héliomonde, c’était bien un peu un test mais, je ne saurais pas dire pourquoi, j’étais sûre que ça ne lui poserait pas de problème.
Le naturisme, mes parents pratiquent depuis leur jeunesse et ils nous ont élevées dedans, Véro et moi. Avec Jean-Luc, le père de Noémie, j’avais un peu arrêté. Il était plutôt contre à priori et n’avait jamais voulu essayer. Mais elle n’avait pas deux ans quand nous avons divorcé et du moment que c’était moi qui l’élevais, il n’a pas fait d’objection aux vacances chez mes parents. Il savait ce que ça voulait dire. Rapidement il y a eu Daniel, rencontré, lui, justement à Héliomonde. Mes trois enfants sont donc naturistes aussi loin qu’ils se souviennent. Nous ne vivons pas nus habituellement dans notre appartement parisien. Simplement nous dormons nus et ne nous cachons pas les uns des autres. Mais chez mes parents, où le jardin et la piscine y invitent, autant que la température le permet c’est tout nus tout le temps.
À Héliomonde, j’ai senti Patrick surpris mais à l’aise tout de suite. Être nu ne semblait pas le gêner et ses regards étaient propres. Les enfants ne s’y sont pas trompés, avec qui il a d’emblée trouvé le ton juste. Même avec Noémie. Et ce n’est pas si facile avec ma petite nymphe. Au naturel sans détours de son enfance qui reste dominant avec nous, elle ajoute depuis un an quelque chose de nouveau. Elle se découvre un nouveau corps, le regard des autres, ceux qui ne lui sont pas encore familiers, lui dit qu’il est joli et elle en prend possession avec une timidité vraie, sans doute, mais qui n’est pas dénuée d’un rien de coquetterie. Je ne sais si Patrick a décrypté cela avec autant de précision mais à l’évidence, il a senti sa différence. Et la façon dont il s’y est adapté, lui qui n’a pas de fille de cet âge, me l’a fait découvrir plus intuitif et plus subtil que je ne l’avais imaginé. Elle a apprécié. Le soir elle m’a dit :
- Tu sais Maman, franchement je me méfiais. Papa, je l’adore et il est super avec moi. Mais, sans vouloir être prétentieuse, je me rends bien compte que si j’étais conne et moche ça lui poserait un problème. Enfin … C’est clair que c’était pas ton genre.
J’ai eu envie de dire « Parce que moi, je suis conne et moche ? », mais je savais bien que ce n’était pas ce qu’elle voulait dire. D’ailleurs, sans trop le montrer, elle a l’air d’habitude plutôt fière de me ressembler et c’est réciproque. Et puis surtout, ça aurait été idiot de la couper à ce moment-là pour une plaisanterie vaseuse. Elle continuait :
- Daniel, j’ai jamais rien eu à lui reprocher mais tu sais bien qu’on se sentait pas tous les deux, ça se commande pas. Après je sais pas si tu en as connu d’autres mais puisque tu nous les a pas présentés … Enfin t’as pas eu tellement de pot jusqu’à présent, quoi. Par contre celui-là … c’est peut-être le bon. Il est cool avec nous, il s’affole pas devant le cul des nanas et j’aime bien comme il te regarde. On dirait qu’il sait aimer.
Elle est capable de dire des choses comme ça du haut de ses douze ans, ma princesse.
De là à envisager de vivre ensemble à plein temps … ça demandait quand même réflexion. Et déjà voir comment ça pouvait se passer avec son fils. Manifestement désireuse de ne rien gâcher, Noémie m’a dit :
- À lui tu vas pas lui faire le coup d’Héliomonde ! Si j’ai bien compris il a pas été élevé comme ça alors les garçons de son âge, même les filles, je les entend ! Pour eux les naturistes c’est des tordus. Quand il nous connaîtra il verra bien que c’est pas vrai mais comme ça tout de suite… Il risque de pas supporter le choc !
Je l’ai rassurée : il n’en avait jamais été question.
Et ça s’est très bien passé. Le gamin est ouvert, mordu de lecture, comme ma Noémie, ce qui lui donne un style un peu précieux quand il s’applique à montrer sa bonne éducation, complètement craquant en ce qui me concerne. Et entre l’activité débordante des poussins et la nonchalance charmeuse de la grande il a tout de suite su se poser.
Mais quand on a envisagé les vacances avec lui, je le lui ai demandé, à Patrick, s’il pensait que ça lui poserait un problème, qu’on vive nus.
Les vacances, je crois bien que c’est encore Véro qui avait combiné ça avec les parents pour qu’on ait trois semaines ensemble, rien que nous deux et les enfants. Mais au départ on n’avait pas prévu Enzo. Seulement ça arrangeait sa mère que Patrick le prenne justement ce mois-là et à priori il n’y avait pas de problème. Sauf celui-là. Et il a eu beau me dire que, puisqu’il se sentait bien avec nous, il s’y ferait sûrement pourvu qu’on n’exige pas qu’il en fasse autant, j’avais insisté pour que tout de même il l’en avertisse. Et surtout qu’il en parle avec sa mère, qu’elle n’aille pas se faire des idées. Moi, j’aime bien jouer cartes sur table. Patrick, lui, … procrastination ou habileté ?
En tout cas, je dois reconnaître que sa politique du fait accompli n’a pas mal marché.
Au goûter, alors qu’on attendait encore l’appel de sa mère, j’ai tout de même préféré demander à Enzo si … C’est vrai que j’y suis allée progressivement. J’ai d’abord parlé des poussins. Et là il m’a tout de suite répondu :
- Là, franchement, non. Non, j’ai été surpris parce que je ne m’y attendais pas mais … C’est tellement évident qu’ils n’y pensent même pas … Même Vanessa !
- Pourquoi « même Vanessa » ?
- Ben … D’accord elle a que huit ans mais c’est quand même une fille et moi je suis un garçon, et je suis pas son frère. Mais c’est sûr que s’ils sont habitués depuis tout petits …
- Et toi, qu’est-ce que tu en penses ?
Il a pris son temps pour me répondre :
- J’ai toujours entendu Maman dire qu’il faut être un peu tordu pour éprouver le besoin de se balader la quéquette à l’air alors … moi, comme j’ai pas envie de montrer la mienne j’étais plutôt d’accord mais … Vous êtes pas des tordus, Papa et toi, c’est sûr et les petits, ils sont … Alors …
- D’abord une précision : les naturistes ne sont pas des gens qui éprouvent le besoin de se balader la quéquette … ou la foufoune à l’air. Ce sont des gens qui aiment sentir la nature, le soleil, l’air, l’eau tu vois, directement sur leur peau et ils ne sont pas les seuls. La seule différence c’est qu’eux ils ne voient pas pourquoi il faudrait faire une exception pour quelques centimètres carrés. Au fond ils pensent que ce sont les autres qui doivent être drôlement obsédés par ces quelques centimètres-là pour ne pas les traiter comme le reste !
Il a réfléchi quelques secondes, puis :
- Logique, on peut pas dire. En fait c’est vrai que les grands ont l’air d’y penser beaucoup, alors forcément, on apprend à penser que c’est pas pareil. Mais si on n’a pas appris comme ça … En conclusion, franchement pour moi je le sens pas mais … puisque c’est logique, vous …
- Tu seras pas traumatisé si on ne met pas de maillots, ton père et moi, pour se baigner, quoi …
- Ben non, je crois pas. De toutes façons je suis pas obligé de vous regarder.
Cet enfant me ravissait. Je l’ai embrassé comme du bon pain.
- Ah si tous les textiles, euh je veux dire les non-naturistes pouvaient raisonner comme toi ! Maintenant il va falloir que ta mère l’admette.
- T’en fais pas, je m’en charge ! Tu sais, elle aussi elle a déjà la tête en vacances alors …
Avant de retourner à l’eau, son goûter fini, il m’a demandé :
- Et Noémie aussi elle se baigne toute nue ?
- Noémie aussi. Mais elle ne sera là que dans dix jours et sois tranquille, elle comprendra très bien que tu préfères garder ton maillot.
Donc voilà un problème réglé et, à la réflexion, Patrick n’a peut-être pas eu tout à fait tort. Patrick qui dort encore, à côté de moi. Les enfants aussi apparemment, puisque je n’entends rien. Quelle heure est-il ?... J’ai envie de le réveiller …
De la chambre à la piscine, nous n’avons rien mis, évidemment. Et quand nous en sommes ressortis, évidemment, Enzo était sur la terrasse. Il est venu nous embrasser pendant que nous nous séchions exactement comme si nous n’avions pas été nus. Décidément, ça va aller.
Patrick est adorable. Il m’aide pour la cuisine, il est tendre quand nous sommes seuls et discret devant les enfants, il joue avec eux comme un gamin, que demander de plus ? Ce matin c’est lui qui s’est éveillé le premier et il m’a raconté ce qu’il a vu : Enzo tout seul s’enhardissant à faire l’expérience de la nudité dans le jardin et la piscine, semblant y prendre plaisir puis, surpris par Benoît, acceptant de rester nu avec lui. Mais pas avec Vanessa. C’est vrai que « c’est quand même une fille » comme il dit. C’est vrai aussi qu’hier il avait abandonné les contorsions sous la serviette pour se changer. Je ne sais pas si c’est un effort qu’il faisait ou si, simplement, il avait finalement choisi le procédé le plus commode, limitant désormais sa pudeur au zizi, mais c’était une évolution, et plus rapide que je n’aurais cru. J’avais recommandé à Patrick de ne pas en parler mais c’est Benoît qui a cassé le morceau. J’ai eu peur. Mais il a bien réagi. Décidément j’adore ce gamin. Et qu’est-ce qu’il m’a dit déjà ? « Maman a dit que chacun fait comme il veut, alors … »
Alors, ou je ne comprends rien, ou ça veut dire que pour se baigner nu comme il a fait avec Benoît ce matin, même s’il ne l’avait pas prévu, il estime avoir le feu vert. Et donc qu’il n’en écarte plus la possibilité. Il faut laisser le temps au temps … Ce n’est pas que ça me gêne en soi, qu’il garde son bermuda, ni du reste les poussins apparemment, mais je trouve ça tellement absurde ! Et il est si bien devenu tout de suite leur grand frère ! Il ne reste que cette petite chose qui le sépare. Enfin, c’est comme ça que je le ressens. Et puis cette liberté que nous aimons, j’ai envie qu’il la partage, il le mérite, et je suis tellement sûre qu’il saura l’apprécier ! Et puis, tout de même, quand Noémie sera là je ne suis pas sûre que ça ne la gênera pas, elle, d’être nue devant un garçon qui ne l’est pas.
En attendant, je vais les appeler à table. Pendant que les petits arriveront en finissant de s’essuyer il va aller au séchoir et changer de bermuda très vite en nous tournant le dos, pour ne pas mouiller sa chaise. Je n’ai pas eu besoin de le lui dire.
Mais qu’est-ce qui se passe ? Un plouf, des cris du genre approbatif, deux autres plouf ! J’avais dit « à table » et les voilà tous les trois retournés dans la piscine ! Et Patrick qui me regarde, l’air ravi ! Un coup d’œil au séchoir et j’ai compris : le bermuda mouillé y est étendu … et l’autre aussi !
Bon, en sortant, sitôt essuyé – comme les autres, sans faire de manières – il est allé chercher son bermuda sec pour venir à table, mais il n’y a pas de doute, le pas est franchi.
Pour les heures les plus chaudes, on évite la piscine trop bien ensoleillée. Les poussins le savent mais, comme chaque année, ils demandent quand même de temps à autre :
- Maman ! On peut y aller ?
Et je finis par répondre :
- D’accord mais on remet d’abord un coup de crème solaire, celle qui tient à l’eau !
Les poussins sont rodés : pour le dos, fesses comprises, ils s’aident mutuellement. J’ai juste à jeter un coup d’œil pour vérifier le résultat. Mais cette fois Vanessa va vers Enzo, le tube à la main :
- Tu veux bien me faire le dos ?
Il hésite une seconde, visiblement surpris, puis se décide :
- Bien sûr ma puce !
Il s’applique bien pour le dos, mais hésite manifestement à descendre plus bas.
- Attends, t’en oublie, intervient Benoît qui a tout compris. Laisse-moi finir.
- Merci Enzo. C’est vrai que t’as pas l’habitude. Pendant ce temps je te fais le tien d’accord ?
Docilement, Enzo présente son dos. Mais il a encore son bermuda. Arrivée à la ceinture, la petite hésite, me regarde. Mon coup d’œil lui dit de ne pas insister.
- Tu viens ? lui dit-elle en le prenant par la main, l’opération terminée, sans réagir, pour une fois, à la claque sur les fesses par laquelle son frère en a signifié la conclusion..
- Attends, j’arrive !
Le bermuda est sur la chaise.
- Le dernier dans l’eau est une poule mouillée, crie Enzo en courant, tout nu, vers la piscine.
- Gagné ! me dit Patrick en m’embrassant.
Puis il ajoute :
- Gagné mais il va prendre un coup de soleil sur les fesses !
- Laisse tomber pour l’instant. Après le goûter on verra ce qu’on peut faire.
Enzo n’a pas remis son bermuda pour goûter. Quelque chose dans son attitude disait qu’il n’était pas encore tout à fait à l’aise, nu parmi nous hors de l’eau, mais qu’il avait décidé de s’habituer. Il n’a pas fait d’objection quand son père lui a proposé de tartiner ses fesses.
- Sinon, demain tu vas avoir du mal à t’asseoir !
Le soir, au moment d’aller se coucher, il a ramassé ses deux bermudas secs pour les rapporter dans la chambre. Les petits nous ont dit qu’il les avait rangés soigneusement dans son sac et que pour la première fois il avait dormi tout nu. On ne les a pas revus.
Vanessa se donne un mal fou pour faire du charme à Enzo qui n’a pas l’air de s’en apercevoir. Benoît regarde ça du coin de l’œil avec un sourire indulgent. C’est amusant, les rapports de ces deux-là. Ils ont si peu de différence : pas même un an. Si Benoît a jamais été jaloux de sa sœur, ça remonte trop loin pour qu’il s’en souvienne. Avec elle il est resté un peu protecteur mais, passées les toutes premières années, surtout partenaire. Parfois même c’est elle qui se fait maternelle avec lui. Ils se chamaillent, bien sûr, mais ils sont si complètement fusionnels que beaucoup de gens les croient jumeaux.
Désormais Enzo participe comme les autres à l’opération crème solaire : tartiner les fesses de Vanessa ou lui laisser tartiner les siennes ne lui pose plus de problème. Nous vivons nus tous les cinq, tout naturellement, comme si le vêtement n’avait jamais été inventé. Et j’ai bien surpris un regard intéressé d’Enzo vers la foufoune ouverte que Vanessa, vautrée dans un transat, étalait au soleil avec la plus parfaite inconscience mais … Intéressé, curieux, pas malsain le moins du monde. Où serait le mal ? Quand je l’ai raconté à Patrick il a souri :
- Moi quand j’ai eu mon premier rapport sexuel je ne savais pas encore vraiment comment c’était fait ! Il y en a qui parlent du mystère féminin et qui trouvent ça poétique. Moi je trouve que ça fait surtout des obsédés et des maladroits. Et c’est pas parce que je te vois nue toute la journée que j’ai moins envie de toi.
- C’est ce que j’ai cru constater !
- La poésie … Moi je la ressens plus dans votre simplicité, dans votre … La façon dont vous avez l’air de faire partie de l’environnement naturel si tu vois ce que je veux dire … Je dis vous parce que j’inclus les enfants. Vous voir jouer au soleil ensemble, eux et toi, c’est … un émerveillement. Je suis content qu’Enzo connaisse ça… Le mystère ! Un truc de pervers pour faire de la mauvaise littérature !
- Moi qui ai toujours connu ça, je ne crois pas que j’aurais su le dire aussi bien. Toi, tu découvres et … Décidément je crois que je vais te garder !
- Parce que si j’en parlais pas bien …
- Ma foi … Ça demande réflexion !
à suivre
1 commentaire:
trouve cette histoire passionnante bien que je me suis un peu perdu dans la relation des personnages et j'attends avec impatiente la suite
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